À crocs

J’avais senti qu’il était nerveux. Sur mes genoux, mon matou peinait à rester en place en attendant le jugement. Il geignait, se trémoussait. Trop de bruits, trop d’odeurs, trop de mouvement. Des femelles en chaleurs qui courbaient leurs queues en levant leurs fesses et des mâles grognants toutes hormones dehors. Ce qui a provoqué le sursaut? Peut-être un grincement du micro, un tremblement de ma part ou un autre animal, passé trop près de nous. Allez savoir…

BOUM. La panique. De toutes ses forces, mon chat pousse sur ses pattes, arc-bouté contre moi, griffes à-demi sorties, pour s’échapper. J’ai deux options: le lâcher, sauvant mes mimines mais sans garantie aucune de retrouver mon doudou dans cette salle noire de monde aux portes mal fermées. Ou le retenir, jouer la force, au prix de quelques griffures et morsures. En toute honnêteté, je ne considère même pas vraiment le premier choix. Je plonge façon rugby. Les poils volent, il hurle en se roulant, pédalant et montrant les dents. Avec de l’aide, je le rattrape une première fois sans dommages collatéraux. La seconde, ma main droite y passe. Je tiens bon; le fauve en furie est maîtrisé et retrouve en quelques minutes son calme. Moi, j’ai du sang jusqu’au coude et le coeur qui bat dans mes extrémités. Les organisateurs du show m’aident: de longues minutes sous l’eau froide, puis un épais pansement alcoolisé. Par chance, une amie vétérinaire est là aussi, et me guide: trois tonnes de bétadine, des anti-inflammatoires, des antibiotiques… et un rendez-vous chez le médecin.

Les urgences, vraiment? Je proteste: l’hémorragie est maîtrisée, la douleur raisonnable et tout a été désinfecté. Mais les éleveuses qui ont connu la même mésaventure me l’assurent: je ne peux pas rester sans une prescription adéquate.

Je ne parviens pas à faire venir SOS Médecins, mais mon généraliste veut bien me recevoir le lendemain à la première heure. En me couchant, le soir même, je commence à comprendre pourquoi les copines m’ont tant encouragée à me faire soigner. Mon membre a doublé de volume, mes doigts prennent la forme et la couleur des saucisses de Francfort et l’idée même de me coucher sur mon bras me met les larmes aux yeux.

Le docteur me confirme ce que m’avait expliqué mon amie véto: les morsures de chats, si petites soient-elles, sont dangereuses. Parce que la bouche d’un chat, même parfaitement vacciné et bénéficiant d’une excellente hygiène, est un nid à bactéries. Je m’en sortirai avec deux jours d’ITT, un énorme pansement, de l’augmentin et des anti-inflammatoires. Six mois plus tard, il reste quelques minuscules cicatrices rondes, là où les dents m’ont plantée.

De cette mésaventure, je tire trois leçons.

  1. Mordue par un chat, je n’hésiterai plus et foncerai chez le médecin. Depuis mon accident, j’ai lu et entendu plusieurs témoignages de propriétaires blessés par leur chat et qui ont tardé à se faire soigner. Tous l’ont chèrement payé : douleurs, opérations, semaines sans pouvoir travailler…
  2. Exposer un mâle non stérilisé peut être très compliqué. Je connaissais la théorie et je me serais bien passée de la pratique. Excité par ses hormones, il est plus réceptif au stress. Et, à cause de son gabarit, moins facile à maîtriser qu’un chaton de deux kilos.
  3. Une bonne astuce pour que personne ne remarque les cicatrices de l’accident ? Faites comme moi: ouvrez-vous un doigt sur deux bons centimètres avec un couteau à pain en préparant un sandwich. La blessure laissera une belle ligne blanche façon blessée de guerre, et éclipsera aisément les quelques malheureux points rouges, qui ne rappelleront qu’à vous seul(e) ce jour où votre main aurait pu jouer dans Le Retour de la Momie.

   

«Vous savez, il ne s’éloigne pas du jardin»

En écrivant ce billet, je sais que je franchis, du bout du pied, une ligne jaune. Celle qui sépare les propriétaires de chats en deux catégories. Si j’étais mauvaise langue, je dirais qu’elle divise les familles et les hôtels. Les maîtres qui se sentent responsables de leur animal et de sa sécurité de ceux qui lui offrent un confort de passage. Ceux qui le gardent dans un espace pour sûr et ceux qui le laissent errer à sa guise. Ceux qui sont contre et ceux qui sont pour «les chats qui sortent», comme on dit. Une brève conversation, ce matin, me pousse à sortir du bois et à attaquer le débat. Assumons, donc. Je suis prête à répondre aux critiques.

Il y a quelques semaines, je relayais sur Facebook l’annonce de recherche d’un chaton élevé par une amie – appelons-le Pitchoune- et confié soi-disant en de bonnes mains, porté disparu. Les fugues sont angoissantes et si l’épisode peut connaître une fin heureuse (.. surtout lorsque la fuite n’en est pas une), qui n’imagine pas les pires scénarios lorsque son compagnon poilu manque à l’appel? Aujourd’hui, l’éleveuse en question m’a informée du destin de son «bébé». Une voiture a mis fin à sa vie alors qu’il avait un an à peine. Pitchoune sortait.

«Vous savez, il ne s’éloigne pas du jardin…» «Il en a besoin! Ça n’est pas fait pour vivre enfermé, un chat!» «Elle aime sa petite promenade du soir, et elle rentre toujours pour dormir.» Ces phrases, souvent prononcées avec un sourire candide et une (petite) étincelle de défi au coin de l’oeil, me crispent. Je ne peux pas ne rien dire. Évoquer, même brièvement, combien combien l’espérance de vie est réduite de plus de moitié par ce gain de liberté. Mentionner le mode de contagion des maladies félines. Témoigner de la mort d’une chatte déchiquetée par un renard et de l’agression d’une autre par un ragondin. Glisser un mot sur ce qu’en dit la loi. Lister les installations possibles à domicile pour rendre le chez-soi adapté à une vie de chat, y compris les enclos et les sécurisations des extérieurs. Philosopher, en empruntant à une autre amie sa thèse: si nos amis matous sont faits à l’origine pour vivre dehors, ils ne sont pas taillés pour faire face aux dangers de la civilisation. Pitchoune ne l’était pas. Mes chats ne le sont pas non plus. Pas parce qu’ils sont des chats de race, mais parce qu’ils sont des chats.

Je suis en colère quand je constate qu’il faut parfois qu’un petit être meure pour que des propriétaires décident de prendre les dispositions nécessaires pour la sécurité de l’ensemble de leurs animaux. Et que, pire, cela ne suffit parfois pas à changer leur mentalité. Je connais des éleveuses qui, au second (ou au troisième!) matou écrabouillé sur la chaussée ou empoisonné par un voisin malveillant, refusent tout net de vendre un nouvel animal à un même acheteur. Pas très légal. Mais les blâmeriez-vous? Moi, non.

Source: PixelShavings

Source: PixelShavings

C’est juste un chat

Tout peut aller si vite. Pour Elja, il n’aura fallu que 48h. Mon homme le premier remarque les vomissements bileux et la respiration haletante. Un coup de fil, je lâche mon verre, saute dans le train pour le rejoindre tandis qu’il rassemble l’essentiel pour une visite nocturne chez le vétérinaire. La puce tremblotte dans ses grands poils bleus emmêlés, le regard vague, les pattes mal assurées. La veille encore, je n’avais rien remarqué.

L’examen dure un peu. La fièvre est forte, le nez encombré, la gorge gonflée. Je n’y comprends pas grand chose, les noms des maladies défilent, sans que le docteur ne se fixe. Je pensais que les vaccins protégeaient de tout ça. J’apprends que non, qu‘il faut souvent plus de rappels et que ça n’est parfois même pas assez. Je saisis que ses jours sont en danger, que tout se jouera heure par heure. Qu’il va falloir l’assister, lui faire respirer des fumigations, lui glisser des comprimés, la nourrir au gel – et prier. J’apprends un mot: le «nursing» , ces soins semi-médicaux, cette route lente vers la guérison, nourrie de caresses et de paroles douces. Je m’accroche mais, aujourd’hui, je sais qu’elle ne s’est jamais vraiment battue. Qu’elle avait lâché l’affaire le premier soir et que l’odeur fétide de sa chambre improvisée n’était pas celle de son haleine, maist celle de la mort. Elle me demandait de l’amour, mais pas des forces. Elle voulait que je l’accompagne, pas que je la sauve. J’ai essayé, jusqu’à la dernière minute. La mettre encore dans son panier, courir à la clinique. Trop tard. Elle avait – comme on dit dans le monde des chats – traversé le pont de l’arc-en-ciel.

La soirée fut, bien sûr, lourde de larmes et de sanglots. L’épaule de l’homme, dans ces moments, est précieuse. Reste le matin. Les traits sont tirés, le regard rougi, les cheveux en bataille – et il va falloir expliquer. Parler aux collègues, au chef. Affronter la phrase, celle qui tape au creux du ventre. «C’est juste un chat.» Elle se veut bienveillante, de celles qui devraient nous aider à relativiser. Bordel, on SAIT. Non, on en trouvera pas un autre, «gratuit, celui-là», dans une portée chez la mamie du coin. On ne le remplacera pas. Oui, il aura eu une belle vie. Trop courte, souvent. Pour Elja, à peine un an. J’ai envie de crier: ce n’est pas «juste» un chat. C’était UN chat. Mon chat.

Un paillasson félin

La guerre des gamelles

La nourriture du voisin est toujours la plus appétissante. Si vous possédez plusieurs chats, particulièrement s’ils ont des besoins nutritifs différents, vous avez sans aucun doute vous aussi vérifié cet axiome. Pour celui qui a tendance à l’embonpoint, rien n’est meilleur que les croquettes riches en calories destinées aux chatons. La femelle gestante sera inévitablement attirée par les menus light. Et c’est toujours le plus jeune que vous retrouverez au milieu de l’assiette de nourriture senior.

La plupart des éleveurs ont ainsi un ou plusieurs félins gros  un peu enveloppés dans leur tribu – souvent les neutres les plus malins, ceux qui attendent le bon moment pour se servir dans les écuelles des futures mamans ou des bébés. C’est ce que je craignais pour Final et Malice en ramenant Legend. À quatre mois tout juste, elle a besoin d’énergie. Mais comment faire pour que les deux autres n’aient pas rapidement le ventre qui traîne par terre? Et pourquoi pas un carton avec un trou dans lequel seule la plus petite pourrait se glisser, dans lequel je disposerais les menus qui lui sont réservés? Très fière de mon stratagème, je mets tout en place. L’affaire dure au moins cinq jours. Le temps pour mon Final de se rendre compte qu’il peut glisser sa patte dans l’orifice, puis SECOUER VIGOUREUSEMENT le tout, histoire de récupérer la nourriture répandue dans tous les sens. La boîte est en lambeaux et mon sol couvert de mini-morceaux de croquettes. Raté. Il me faut une autre idée.

Le temps qu’il comprenne…

Je décide de distribuer une nourriture normale, en libre service, durant la journée, et de compléter le tout pour la nouvelle venue avec deux repas humides spécifiques, très appétants et plus adaptés à sa croissance. Reste à éloigner les importuns le temps que la demoiselle termine sa gamelle. Pas de problème avec ma noiraude, qui ne s’intéresse qu’aux croquettes (et à quelques aliments étranges comme les gâteaux de ramadan et la salade verte, mais j’y reviendrai). Avec Final en revanche, c’est une autre paire de manches. Mais, après tout, un chat peut apprendre. Je m’emploie donc à lui expliquer qu’il ne doit PAS voler dans l’assiette de sa copine. Je la sers en hauteur, sur une table. BUMP. Il saute pour la rejoindre. «Non Final». Je le pose à terre. Je tourne les talons. BUMP. «Non Final!». Le chat redescend. Il comprend vite, et, en quelques jours, ne tente plus de voler lorsque je suis à proximité. Je vois qu’il a parfaitement saisi que monter sur la table est strictement interdit. Quelle fierté d’annoncer à mon homme que j’ai réussi à expliquer quelque chose à mon chat…

Ce soir-là, je m’installe donc dans mon canapé après avoir servi Legend, l’esprit tranquille. De toute façon, un BUMP sonore me préviendra de toute tentative de chapardage, non? Alors, lorsque Final vient se blottir contre moi pour des câlins et que son haleine empeste le sachet de nourriture chatons fraîchement englouti, je reste perplexe. Comment a-t-il pu se servir sans que je ne m’en rende compte? Et pourquoi n’a-t-il pas un seul instant l’air coupable? Je ne dis rien. J’attends, je guette du coin de l’oeil. Et assiste à un bien curieux manège. Pendant que Legend termine son dîner, Final s’assied au pied de la table. Lentement, il étend une patte, la pose sur le meuble et tâtonne. Attrape quelques morceaux, les fait tomber et les engloutit, à même le sol. «NON FINAL!» Ses grands yeux innocents se fixent sur les miens. Son message limpide: «Ben quoi? J’ai respecté tes règles, regarde! Je ne suis pas SUR la table!»

Et qui pourrait lui dire le contraire?

 

Un chat repu

Nourriture pour chats

Un bébé? Comment tu vas faire, avec les chats?

C’est vrai, ça. Comment faire, un bébé avec les chats? Peut-être que je pourrais les donner? Parce que les euthanasier, quand même, ce serait un peu extrême. Mais plus raisonnable, non?

J’exagère? A peine. Lorsque j’ai annoncé ma grossesse, c’était presque LA question rituelle. Celle qui suivait les félicitations. La première fois, je n’ai même pas compris. La personne en face de moi faisait-elle allusion à l’espace nécessaire pour qu’un enfant puisse avoir sa propre chambre? Mais nous avions acheté une grande maison deux ans auparavant. Était-ce un problème de gestion des chats pendant les quelques jours passés à la maternité? Allons, l’homme saurait bien ôter trois crottes et remettre une poignée de croquettes. Mais non, sincèrement, mon interlocuteur semblait craindre pour l’intégrité physique de mon enfant. J’ai même fini par déceler chez certains un curieux sous-entendu : «Maintenant que tu vas avoir un – VRAI – bébé, plus besoin de tes bouche-trous poilus, n’est-ce pas?»

BOUM. Renvoyée à mon statut de folle à chats. Il ne me reste qu’à respirer un grand coup et expliquer. À lister les dangers (réels ou fantasmés). Non, je n’ai aucune intention de laisser mon futur enfant seul dans une pièce avec les chats. Non, ils n’entreront pas dans sa chambre: ils n’ont d’ailleurs pas accès à la nôtre (Vous vous rappelez, les histoires de pipi sur l’oreiller… Elles ont définitivement fermé aux quatre pattes de toute pièce comportant un lit.) Oui, il peut y avoir des allergies, c’est un risque et nous y accorderons toute l’attention nécessaire. Evidemment, je ferai de mon mieux pour qu’il n’ingurgite pas de poignées de poils et lui laverai les mains après les séances de câlins félins.

«D’accord… Et puis, pour toi, rien à craindre? Tu es immunisée contre la toxo, d’ailleurs, avec tous tes chats, non?» Je l’avoue, j’ai plusieurs fois songé à éluder pour avoir la paix. J’ai renoncé (surtout parce que je mens très mal) et, là encore, j’ai détaillé. L’homme s’occupe des litières. Je me nettoie soigneusement les mains. Et mes chats, vivant exclusivement en intérieur, n’ont que peu de risque de contracter la maladie et donc de la transmettre. D’ailleurs, ils ne m’ont pas contaminée jusqu’ici, pas vrai?

Squatteuse de parc

Au fil des conversations, l’argumentaire se rôde. Mais, au fond, je commence à m’inquiéter… pour les chats. Pour Malice, surtout. Sur les cinq minous, un seul d’entre eux a vécu avec un enfant en bas âge. Et rien ne dit que les pleurs du bambin ne les transformeront pas en choses tremblantes tapies sous les canapés. Alors, lorsque je rentre un matin avec les photos de mon échographie, que je les balance sur le canapé et qu’elles sont immédiatement arrosées de pisse fraîche par ma terreur noire, comment ne pas y voir un signe de guerre? Les mois avancent, mon ventre s’arrondit et je me demande encore si le petit monde pourra cohabiter sans stress. Et je n’ai pas acheté de super-CD-avec-des-pleurs-de-bébé pour les préparer.

Pour quatre d’entre eux, l’arrivée du mini-moi n’a finalement rien changé. Bien sûr, il y a eu une certaine méfiance envers ce petit humain au volume sonore inhabituel. Rien d’insurmontable: tous ont fini par s’asseoir non loin de lui lorsque je le tiens sur mes genoux. Pour Inesh, l’humain demi-portion a immédiatement été une nouvelle cible de câlins. Drôle de surprise de découvrir la patience de ce chaton, tenace dans sa recherche de caresses, qui se frotte contre les petons en ronronnant. Et les gestes lents, étonnamment précautionneux, d’un enfant de quelques mois à peine qui découvre le contact de la fourrure sous ses doigts. Aucun mouvement brusque, aucune griffe sortie. Une léchouille, de temps en temps, ou une queue attrapée tout au plus. Complices.

Je mentirais si je disais qu’aucun de mes chats n’est jaloux de l’attention accordée à la petite chose sans poils. Je ne m’en étais pas aperçue, mais à force de retrouver Helgen tantôt lovée au milieu des jouets du parc, tantôt prête pour un changement de couche sur la table à langer, j’ai fini par comprendre le message. «Occupe-toi de moi aussi.»

Je pense que je suis prête pour répondre à la question. Comment je fais, avec les chats? Je recouvre le parc quand l’humain de poche n’y est pas afin d’éviter qu’il récolte de la pisse des poils. Je ferme la porte de la chambre à coucher. Et je garde un oeil sur le bébé, en toutes circonstances. Mais ai-je vraiment besoin de le préciser?

 

Un chat et un bébé..... Qui est le mieux loti?

Les aventures de la pisse de Malice, épisode 1

S’il est un organe félin dont l’humain se passerait bien, c’est sa vessie. Il y a les mâles entiers qui marquent leur territoire –  défonçant au passage les narines de tout être humain normalement constitué à proximité. Il y a les minettes en chaleurs, spécialistes de l’arrosage collectif de canapé. Il y a les chats difficiles, qui délaissent leur litière si elle est trop sale à leur goût, mal placée ou si le substrat crisse sous leurs pattounes, leur roule entre les orteils – bref, tout simplement, leur déplaît. Et puis il y a Malice. Malice est le genre de chats à pisser sur ton sac de cadeaux de Noël <sous ton nez> sans autre forme de procès. A noyer ton oreiller ou ta couette, pour une sensation unique au réveil. A repeindre les sacs des copines passées prendre le thé (j’aurai l’occasion d’y revenir dans un futur billet).

Imaginez le bonheur de mon homme, pas félinophile pour deux sous à l’origine, qui se retrouve contraint à vivre avec une Dame Pipi. Et auquel il m’a fallu expliquer que non, secouer un chat ou lui mette des pieds au derrière ne servirait à rien d’autre qu’à défouler l’humain. Mieux valait, expliquais-je, être pédagogique. Pourquoi pas la méthode du vaporisateur à eau, déjà utilisé pour le ménage, qui génère de l’inconfort chez le chat, ne cause pas de douleur et dissocie le désagrément de son maître. Sans grande conviction, l’homme se pliait à cette méthode d’apprentissage.

Attention, parquet glissant

Ce soir là, j’étais sortie. Le maître des lieux rentrait donc seul, après une longue journée de travail, le costard encore sur le dos et la cravate bien serrée, la tête lourde et les jambes en coton. En poussant la porte de notre petit appartement du centre de Paris, il n’avait qu’une hâte: jeter en vrac manteau et chaussures pour s’affaler et respirer. Ce qu’il fit. Jusqu’au moment où il aperçut, du coin de l’oeil, la boule de poils grimper sur le fauteuil où gisait le beau pardessus noir dont il venait de se débarrasser. Il ne fallut qu’une poignée de secondes à Malice pour l’imbiber de pisse. Et encore moins à l’homme pour bondir sur ses pieds, se saisir du vaporisateur et courir après le chat en hurlant et en l’aspergeant d’eau. Chat pour lequel, souvenez-vous, une course-poursuite est avant tout un jeu. Même en hurlant.

Mais. Il y a un mais. Les parquets en bois n’absorbent pas bien l’eau renversée. Et les morceaux d’une armoire tout juste démontée posés à la verticale, c’est TOUJOURS dangereux. Alors quand l’homme, en chaussettes, dérapant dans le couloir, a posé le pied sur une mini-flaque tout droit sortie du vaporisateur, la chute était inévitable. Une fois sur le dos, le costume semi-trempé par les éclaboussures, il eut à peine le temps de lever les bras pour se protéger des planches. BOUM. Coincé. Pire qu’une scène de dessin animé.

Et le chat, me direz-vous? Il avait grimpé sur le tas de bois sous lequel l’homme gisait, misérablement. La tête penchée sur le côté, il appelait, doucement. Pour recommencer, évidemment.

 

World domination for cats

Visite chez mon voisin

Il est peut-être déjà dix ou onze heures. Une belle soirée avec Marlène, ma meilleure amie, venue de Suisse pour un jeu de rôles grandeur nature, de passage à la maison. Elle se lève à quatre heures, le lendemain, pour rejoindre les autres joueurs. Nous terminons nos verres et installons un lit de fortune – une chauffeuse Ikéa, si ma mémoire est bonne –  dans le salon pour que notre invitée d’un soir puisse se reposer. Assise au coin de la pièce, Malice nous regarde. Minuit, c’est SON heure. Le moment de courir partout, attraper n’importe quoi et faire tomber tout objet posé sur une table ou une étagère. Je grimace et glisse à mon fiancé: «Tu ne voudrais pas jouer dix minutes avec le chat, pour la fatiguer, histoire qu’elle laisse dormir Marlène?» Il est important ici de préciser que pour Malice, le seul jeu valable est une sorte de cache-cache hystérique, qui se termine toujours en course poursuite. La partie commence, l’humain sautille, le chat s’éclate et…

DING DONG

Tiens, la porte? Ah oui, c’est vrai, le parquet en vieux bois. Non-isolé. Et les voisins du dessous. Vous savez, le genre de jeune couple actif propre sur lui, primo-accédent. Eux qui sont venus, la semaine de notre emménagement, s’assurer que nous marcherions bien en chaussettes chez nous pour ne pas faire trop de bruit. En ouvrant la porte, nous savions donc ce que nous allions découvrir. Ou plutôt qui. C’est mon homme qui s’y colle et affiche l’air contrit de circonstance. En pyjama, l’oeil bouffi, le voisin nous lâche cette réplique mythique: «Ça va pas être possible là, on croirait que vous jouez au bowling.» Piteux, nous nous excusons -longuement, parce que le grognon ne semble pas vouloir tourner les talons, pour nous faire payer ses minutes de sommeil perdues.

Or, tout possesseur de chat d’intérieur le sait: garder une porte ouverte plus d’une minutes est risqué. Mais allez l’expliquer à un voisin aux joues barrées de marques d’oreiller! Les effort pour le congédier ne portant pas leurs fruits, l’inévitable se produit: Malice prend la poudre d’escampettes, entre les jambes de l’importun, et commence à descendre dans l’immeuble. En une seconde, le masque de politesse de mon homme s’évanouit. ««MALICE, REVIENS!!!» «Bon, je vais vous laisser.», murmure le râleur, soudain radouci, avant de se sauver chez lui, suivi dans les escaliers par mon chéri affolé. Il pousse la porte de son appartement.

FATALE ERREUR

La tornade noire s’engouffre derrière lui. «HIIIIIIIIII MAIS C’EST QUOI CE CHAT???» Tiens, la voisine a, elle aussi, fait la connaissance de Malice. N’osant franchir le seuil, mon cher et tendre attend sur le pallier. Il glisse un regard à l’intérieur et se rend compte que notre minette s’est invitée SUR le lit de la dame. Je ne sais pas exactement comment le monsieur finit par attraper la fuyarde par la peau du cou. Il la balance dans les bras de mon homme en grognant quelque chose comme «Voilà votre chat.» avant de claquer la porte.

Depuis, nous avons déménagé. Je ne regrette pas mes anciens voisins. La réciproque est sans doute vraie.

 

Ne pas laisser sortir le chat - quoi qu'il vous dise.

 

 

J’ai perdu mon chat

C’était un jeudi soir, après une grosse journée de travail. J’aime bien rentrer chez moi le jeudi soir parce que la femme de ménage est passée un peu plus tôt, et que je retrouve une maison propre et accueillante – en théorie. Parce que ce soir là, en poussant ma porte, j’ai découvert mes poubelles au milieu de la cuisine. Catastrophée, je me dépêche de les débarrasser. Je n’ai aucune envie qu’un de mes chats attrape un déchet ou, pire, une ficelle du sac, et s’étouffe avec. Je comprends rapidement qu’en l’absence de l’intervenante habituelle, notre société de nettoyage à domicile nous a envoyé une remplaçante… bien mal informée. Car plusieurs détails clochent: l’aspirateur n’est pas à sa place, par exemple. Et je ne vois que quatre chats. Quatre chats.

Celle qui manque? Celle qui ne cherche jamais à se sauver. Ma boulette, mon Helgen, celle que j’ai aidée à naître et qui a donc grandi chez moi. J’appelle, je cours dans tous les sens, déplace des meubles, inspecte ses endroits favoris. En vain. En pleurs, j’appelle mon mari, ma mère et une amie éleveuse. «Je ne sais pas, ce n’était pas la femme de ménage habituelle. Oui, elle a dû se glisser entre ses jambes. Non, ça doit faire plusieurs heures déjà…»

À la nuit tombée…

Alors j’imprime des affichettes avec une photo récente et je commence à faire le tour du lotissement. Pendant quelques minutes, je me sens merdeuse. La plupart de mes voisins n’ont pas d’animaux. Pour ceux qui ont des chats, sortir est une chose normale. Moi, avec mes chats d’intérieur, je suis une extra-terrestre. Avec mes chats de race aussi, d’ailleurs. Je les entends d’ici m’expliquer qu’un chat sait se débrouiller, qu’elle finira bien par rentrer, que le leur, d’ailleurs, a plusieurs fois découché. Et je devrai faire le poing dans ma poche pour ne pas leur confesser que je n’ai pas envie de récupérer ma minette engrossée par le premier matou (malade) du terrain vague d’à côté, que mon chat, beau et peu farouche, peut être parti avec n’importe qui et n’a jamais vu une voiture de sa vie. Bref. L’accueil est finalement plutôt bon de leur côté, et même si je m’efforce de ne pas dramatiser devant eux, je les sens plutôt compréhensifs. Mais aucun d’eux n’a vu mon chat.

La nuit est tombée, j’ai du mal à me rassurer. Mon mari me console et, tandis que je me douche, fait un dernier tour de la maison. Des cachettes. Des placards coulissants. Des lourds tiroirs de la commode. Des tiroirs de la commode? Au fond du dernier, soigneusement refermé, Boulette dormait, et c’est à peine si elle a levé la tête quand on l’a enfin dénichée, pas désireuse pour deux sous de s’extraire de son nouveau panier. Vous pensez qu’elle se serait manifestée? Qu’elle aurait risqué un «miaou» pendant qu’on la cherchait? Qu’elle aurait gratté contre le bois? ERREUR. C’était, dirait-on, bien plus drôle comme ça. Humour de chat…

 

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J’habite chez mon chat

… enfin, chez mes chats, pour être exacte. Cinq chats. Beaucoup trop pour le commun des mortels. Pas assez pour une mémère à chats en puissance comme moi. Cinq chats, c’est cinq fois plus de poils sur le canapé. C’est cinq fois plus de crottes, de croquettes répandues à côté de la gamelle, de grains de litière qui craquent sous les pieds le matin quand on est mal réveillé. C’est cinq fois de traces de pattes sales sur la table. Ça, c’est surtout ce que voit mon mari.

Moi, j’avoue, je vois cinq fois plus de câlins. Cinq fois plus de ronrons et de jeux. Ça compte aussi, non?

Vous aussi, vous avez parfois (souvent?) l’impression d’être devenu le locataire tandis que le chat, jalousement, veille sur la télécommande – et ne se poussera de l’écran que lorsque vous aurez ouvert sa boîte de pâtée? Vous avez déjà été tiré du lit à quatre heures du matin par un vibrant miaulement pour un câlin MAINTENANT? Vous avez déjà épongé et récuré une flaque de pipi parce non, la maison de toilette ne contient pas exactement le substrat qu’il faudrait pour que le Dieu à quatre pattes daigne y faire ses besoins?

Alors bienvenue sur ce blog. Je pense qu’on va s’entendre.

La vraie catwoman

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